Au fil du temps, il peut arriver qu’une personne âgée en arrive à devoir casser maison pour être hébergée en résidence pour aînés ou en CHSLD.

Cette prise de décision est complexe pour la personne, qui doit vivre avec la perte de son autonomie et quitter l’endroit qui la sécurise le plus : SA maison. Le rôle de soutien par le proche aidant dans cette transition est crucial afin que tout se déroule de la meilleure façon possible.

Quelques chiffres sur les Canadiens de 85 ans et plus

2046

Année pendant laquelle cette population pourrait tripler et atteindre près de 2,5 millions de personnes.

12 %

C’est l’une des populations présentant la croissance la plus rapide; elle a augmenté de 12 % par rapport à 2016.

3,4 %

Au Québec, c’est dans la ville de Trois-Rivières où l’on retrouve le plus de personnes dans cette tranche d’âge, soit 3,4 % de la population.

Source : Statistique Canada

De la perte d’autonomie jusqu’au centre d’hébergement

L’aîné qui quitte son chez-soi vit un lot de deuils multiples, ce qui peut représenter l’une des périodes les plus difficiles de sa vie. Quant aux proches, ils sont aux prises avec le dilemme de respecter la décision de la personne de demeurer chez elle et les enjeux liés à sa sécurité. Parfois, c’est le proche aidant qui se voit forcé de convaincre la personne qui résiste à accepter cette étape difficile. Par la suite, lorsqu’une décision commune amène la personne à quitter la maison, le proche peut être animé d’un fort sentiment de culpabilité.

Pour l’aîné, les deuils sont multiples :

  • Il se voit décliner physiquement et intellectuellement
  • Il se voit contraint de quitter un environnement qu’il aime et qui le sécurise
  • Il anticipe de se retrouver dans un milieu de vie qu’il n’appréciera peut-être pas
  • Il sait qu’il devra vivre en collectivité et respecter un horaire qu’il n’a pas choisi
  • Il craint de perdre totalement son autonomie
  • Il souffre de devoir se départir de biens précieux par manque d’espace au nouvel endroit

Quant au proche aidant, il doit faire le deuil de son parent autonome.

Cette transition engendre aussi chez lui son lot de stress et d’anxiété.

  • Est-ce que je dois respecter ce que ma mère veut ou dois-je décider à sa place?
  • Jusqu’à quel moment pourrais-je m’occuper d’elle ou de lui?
  • Est-ce que le fait de casser maison va désorganiser ma maman?
  • Va-t-elle être en mesure de s’adapter à ces nouveaux changements?
  • Ça fait 50 ans qu’elle habite dans la même maison : suis-je vraiment obligée de la déraciner?
À tort, le proche aidant croira souvent que c’est parce qu’il n’est plus capable d’accompagner son parent que celui-ci devra quitter sa maison, ce qui peut générer un sentiment de culpabilité. Or, il est important de se rappeler que c’est la maladie en elle-même qui est la cause de ce changement, car elle aura pris le dessus.

Quand vient le temps de quitter sa maison

La proche aidante France Moreau raconte la transition de sa mère vers une maison d’hébergement.

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À quel moment?

Bien que la ligne soit mince et qu’il n’existe pas de recette magique, la décision de déplacer la personne aux prises avec un TNC doit se prendre lorsque les enjeux de sécurité surpassent les bénéfices à demeurer à la maison.

Exemples d’enjeux de sécurité :

  • Oublier des plats sur la cuisinière ou de fermer le robinet, être confus devant le fonctionnement des électroménagers, etc.
  • Errer dans la maison et se faire souvent mal, sortir sur la rue et se perdre, etc.
  • Ne plus s’alimenter correctement ou être indifférent devant certaines situations nécessitant une réaction (blessure, etc.)

Entourer et accompagner la personne avec bienveillance

Avez-vous l’impression que votre proche a accès à sa mémoire, aux connaissances sur le monde qui l’entoure actuellement et qu’il peut raisonner sur l’information qu’on lui présente pour prendre la bonne décision pour lui? Si la réponse est oui, il sera possible de suivre les étapes suivantes pour l’amener à entreprendre la transition vers un lieu extérieur d’hébergement. Si la réponse est non parce que la maladie l’en empêche, c’est à la famille et aux proches aidants de l’aider à faire ce choix. Le proche aidant n’est pas obligé d’assumer la responsabilité seul et doit aller chercher de l’aide de professionnels de la santé pour l’accompagner dans ce cheminement.

La conversation bienveillante

Entreprendre la conversation sur le sujet avec bienveillance en reconnaissant que le point de vue du proche est tout aussi important que le sien.

Maman, aimes-tu vivre seule?

Maman, penses-tu que ta maison est toujours adaptée à tes besoins et ta situation?

Qu’en penses-tu?

La personne peut être consciente qu’il pourrait y avoir des conséquences graves, mais les accepte. Elle pourrait aussi aborder elle-même le sujet, en disant craindre pour sa sécurité.

Papa, tu as eu plusieurs chutes depuis un certain temps. Est-ce que tu sais que tu pourrais te fracturer un os? Cela impliquerait par exemple de limiter tes mouvements et de devoir te déplacer avec une marchette.

Amener la personne à comprendre que les risques sont plus élevés que les bénéfices de demeurer à domicile.

Maman, la cuisinière est demeurée ouverte toute la journée et un incendie a failli se déclarer. Crois-tu que tu serais plus en sécurité dans une autre maison?

Si votre proche affirme vouloir quitter la maison une journée et dit le contraire le lendemain, c’est qu’elle a besoin d’aide pour prendre la décision. Papa, désires-tu que je t’aide à réfléchir davantage sur la possibilité de déménager dans un RPA ou un CHSLD?

Faciliter la transition

La Dre Christine Grou, psychologue et présidente de l’Ordre des psychologues du Québec, discute des étapes et des défis reliés au changement de domicile avec la psychologue Catherine Mulcair et la proche aidante France Moreau.

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Perceptions trompeuses

Le proche aidant doit nommer ce qu’il perçoit, car parfois ce n’est pas du tout ce que l’aîné ressent. Par exemple :

  • S’imaginer que son proche vivra un grand déracinement alors que ses pertes cognitives font en sorte qu’il ne se reconnaisse même plus dans sa propre maison
  • Croire que son proche veut à tout prix vivre dans sa grande maison alors qu’il n’a plus l’énergie pour s’en occuper
  • Vouloir éviter un déracinement, alors que la personne s’ennuie seule à la maison et souhaite se retrouver dans un nouvel endroit pour briser son isolement

Les perceptions sont parfois trompeuses. L’important est d’en discuter!

Marie, proche aidante et préposée aux bénéficiaires

Marie Martel est préposée aux bénéficiaires et proche aidante. Sa philosophie : traiter ses parents et ses patients comme elle voudrait être traitée.

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Inaptitude

À un certain stade, la personne peut nécessiter un besoin de protection sur le plan légal sur ses capacités à prendre des décisions concernant son bien-être et la gestion de ses biens. Une évaluation clinique par un professionnel pourrait alors conclure à une inaptitude. Soulignons qu’il s’agit d’abord et avant tout d’un besoin de protection qui vise aussi à maintenir l’autonomie de la personne, au meilleur du possible.

Pour en savoir plus : Protecteur du citoyen : un proche devient inapte : que faire?

Connaissez-vous… l’importance des objets familiers?

L’important pour la personne qui quitte son domicile est de retrouver un sentiment de sécurité, même si elle change d’environnement physique. Pour bien l’accompagner à s’installer dans son nouveau lieu d’accueil, il est important d’apporter des objets qui lui sont chers et familiers : photos, courtepointe, objets et bibelots, etc. L’approche bienveillante du personnel soignant à son égard sera toute aussi essentielle pour favoriser une transition harmonieuse.

Vrai ou faux? Une adaptation impossible?

Après avoir passé 50 ans dans la même maison, il est impossible de pouvoir s’adapter à un autre milieu de vie, surtout pour une personne atteinte d’un TNC.

FAUX

Vous pourriez vous imaginer à tort que votre père tient mordicus à demeurer chez lui, alors qu’il est au contraire très fatigué d’entretenir lui-même sa maison. C’est la raison pour laquelle vous devez vous entretenir avec votre proche sur ses besoins, aspirations et préoccupations. Ceci dit, une personne qui présente un TNC peut s’adapter à un nouveau milieu de vie et y retrouver des repères, de même qu’un sentiment de sécurité. Un soutien variable en ce sens peut être requis.